Guillaume Paoli, directeur général délégué d’Aramis Group : « Aramis, une valeur de croissance sur un marché de l’occasion à fort potentiel »
Parmi les plus grosses introductions en Bourse de cette année, cette filiale du constructeur Stellantis, leader européen sur le marché des véhicules d’occasion connait des débuts compliqués sur le marché parisien. L’un des cofondateur, Guillaume Paoli, fait le point sur le dernier exercice et sur les perspectives du groupe.

Quel regard portez-vous sur les premiers comptes annuels publiés par Aramis Group en tant que société cotée ?
Guillaume Paoli : 2021 aura été une année riche et exceptionnelle à bien des égards puisqu’elle a été marquée le 18 juin par l’introduction en Bourse d’Aramis que j’ai cofondé avec Nicolas Chartier en 2001, par le relèvement en septembre de nos objectifs financiers et par la publication aujourd’hui de comptes annuels en très forte croissance. Notre chiffre d’affaires affiche une progression de 25,9% à 1,36 milliards alimentée par le segment stratégique des ventes de véhicules reconditionnés en hausse de 37,4%. Cette dynamique s’est accompagnée d’un gros effort d’investissement pour préparer la croissance future d’Aramis visant à ouvrir de nouveaux centres de reconditionnement, à enrichir nos sources d’approvisionnement et à capitaliser sur nos marques à travers des dépenses marketing. En réalisant désormais plus de la moitié de notre chiffre d’affaires à l’international et en mettant l’accent sur le créneau des véhicules reconditionnés, nous avons su faire évoluer le groupe. Aramis confirme ainsi son profil de valeur de croissance évoluant sur un marché résilient des véhicules d’occasion à très faibles kilométrages ou reconditionnés et disposant d’un potentiel très important.
Dans quelles mesures les difficultés du marché des véhicules neufs vous pénalisent-elles ?
G. P : Depuis deux ans maintenant, la production automobile mondiale a chuté de 20%, rendant forcément plus compliqué l’approvisionnement en véhicules à très faibles kilométrages auprès des loueurs ou des constructeurs, notamment Stellantis notre actionnaire principal. Et cela ne va malheureusement pas s’améliorer en 2022. Ce qui ne nous empêche pas de relever une nouvelle fois nos perspectives pour l’année prochaine avec un chiffre d’affaires anticipé désormais supérieur à 1,6 milliard et une très forte progression de 45% (contre +30% précédemment) de volumes de livraisons de véhicules reconditionnés.
Dans cet environnement du neuf compliqué, le groupe a développé certaines de ses sources d’approvisionnement de véhicules comme les particuliers. Par ailleurs, le choix stratégique de donner la priorité aux véhicules reconditionnés est vertueux pour l’environnement puisque moins demandeur de ressources naturelles qu’un véhicule neuf et renforce la participation d’Aramis à l’économie circulaire et son empreinte éco-responsable.
Le segment des véhicules reconditionnés est-il plus ou moins rentable que celui des occasions récentes ?
G. P : La marge de 2292 euros que nous avons dégagée l’an dernier en moyenne sur chaque véhicule vendu est équivalente entre les deux marchés de l’occasion récente ou du reconditionné. Et ce, malgré un cahier des charges très exigeant dans le reconditionnement visant à offrir à nos clients la meilleure fiabilité et les meilleures garanties. Nous multiplions ainsi les expertises des véhicules à reconditionner au moment de l’achat, à son arrivée sur le site de reconditionnement et après les travaux de remise en état. Etant sûr de la qualité de nos véhicules vendus, le groupe n’hésite pas à proposer à ses clients toutes sortes de solutions comme la possibilité pendant 30 jours ou 1000 kilomètres de revenir sur leur décision d’achat. Et tous nos véhicules sont garantis 1 an.
Pourquoi conserver un réseau de 61 agences alors que votre business model est digital ?
G. P : Effectivement, notre stratégie repose sur la vente en ligne. Il nous semble malgré tout pertinent de disposer d’un réseau limité de points de vente pour des raisons d’image et de marketing visant à développer la marque Aramis auprès de nos fournisseurs et de nos clients. Certains d’entre eux préfèrent commander et réceptionner leur véhicule dans nos agences plutôt qu’en ligne sur nos différents sites internet ou chez eux. Cela les rassure. Toutefois, l’objectif pour le groupe n’est pas d’étoffer le réseau de points de vente mais davantage de mettre l’accent sur son développement en Europe.
Justement comment se déroule l’intégration de CarSupermarket en Grande-Bretagne ?
G. P : Très bien même s’il a fallu attendre 3 mois après l’acquisition en mars dernier de CarSupermarket pour se rendre sur place en raison du Covid. Plusieurs plans d’actions ont d’ores et déjà été mis en œuvre en vue d’accélérer la croissance de la société : les équipes ont été renforcées, le site de reconditionnement situé à Goole a été amélioré et un nouveau devrait ouvrir prochainement à Hull, un gros travail de sourcing de véhicules auprès des particuliers est réalisé et nous développons la plateforme digitale.
Quelle est votre stratégie en matière de croissance externe ? Renforcez vos positions dans les quatre pays existants ou prendre pied sur de nouvelles régions ?
G. P : Non, déjà présent en Grande-Bretagne, en Espagne, en Belgique, l’idée est d’accélérer le développement d’Aramis dans d’autres pays d’Europe. L’Allemagne, l’Italie, la Pologne, le Portugal ou le Danemark sont des marchés, parmi d’autres, qui nous intéressent.
De quelle marge de manœuvre financière dispose le groupe ?
G. P : Elle est importante puisqu’après avoir levé 250 millions d’euros lors de l’introduction en Bourse mi-juin, Aramis s’est désendetté et disposait fin septembre à la clôture de l’exercice d’une trésorerie nette de 102 millions et de différentes lignes de crédit non utilisées pour 200 millions.
Quelles sont vos perspectives pour cette année ? A plus long terme ?
G. P : Grâce à nos efforts d’investissement visant à préparer la future croissance d’Aramis, nous sommes très confiants à court et moyen terme. Pour l’exercice 2021/2022, nous relevons notre objectif de chiffre d’affaires désormais espéré à plus de 1,6 milliard avec une forte progression de 45% des ventes de voitures reconditionnées et une marge d’excédent brute d’exploitation ajustée de l’ordre de 1,5%. Celle-ci devrait remonter à 3% à l’horizon 2025 mais va rester à court terme pénalisée par les investissements. Pour autant, Aramis demeure le seul acteur européen du secteur de la vente de voitures d’occasion à être rentable. La perte nette de 15,7 millions extériorisée sur le dernier exercice s’explique par des charges non récurrentes liées à l’introduction en bourse (6,6 millions) ou à des provisions relatives à des compléments de prix sur des acquisitions pour 18 millions.
Disposez-vous d’une politique ESG ?
G. P : L’ESG est au cœur de notre métier de la vente de véhicules d’occasion et nos engagements figurent dans une charte appelée « Act for Greener Driving ». Contrairement aux constructeurs automobile, notre business model vise à redonner une nouvelle vie aux voitures avec un impact sur l’épuisement des ressources minérales inférieure de 19% à celui d’un véhicule neuf. Nous réparons les pièces de carrosserie plutôt que de les changer, nous recyclons par exemple en Espagne les plastiques et nous encourageons nos logisticiens à utiliser les biocarburants.